Le modèle Clubhouse de réhabilitation psychosociale est un lieu d’activités de jour non médicalisé, créé pour et avec des usagers en santé mentale, dans le but de faciliter leur socialisation et leur insertion professionnelle. Ce lieu permet d’y retrouver des pairs pour parler librement dans une ambiance de compréhension, de participation et de partage amical.
Sur ce modèle de réhabilitation psychosociale, qui a fait ses preuves dans plus de 30 pays pour accompagner des personnes en situation de handicap psychique dans leur insertion sociale et professionnelle, le premier Clubhouse français a ouvert à Paris en novembre 2011. Principalement grâce à la générosité privée, ce lieu d’entraide unique en France est actuellement en cours d’expérimentation dans la perspective de sa modélisation et de son essaimage au niveau national.
Clubhouse Paris, au départ hébergé quai de Jemmapes au « Comptoir Général », a maintenant des locaux propres (et spacieux : 350m²) dans le 19ème, et propose un lieu de vie communautaire qui vise à la réinsertion sociale et professionnelle de personnes souffrant de troubles mentaux (dépression sévère, schizophrénie, troubles bipolaires).
Comme tous les Clubhouses, il a pour missions d’informer, d’accompagner, de maintenir l’espoir, d’aider également les personnes à sortir de l'isolement, à participer à la déstigmatisation, et à faciliter leur insertion professionnelle.
Le modèle Clubhouse vient des États-Unis.
C’est dans les années 1940 qu’il est impulsé par un groupe de personnes atteintes de maladies psychiques (troubles maniaco-dépressifs, schizophrénies et dépression sévère). Ils croyaient en la capacité d’entraide des malades, philosophie sur laquelle repose tout le modèle Clubhouse. C’est au Rockland State Hospital de New York qu'a été pensé et fondé en 1943 le principe d’entraide au-delà de la méthodologie des clubhouses.
La première organisation qui est créée par ce groupe prit le nom de « WANA », qui était l’anagramme de « We Are Not Alone ». Cet acronyme est choisi pour le lien qu’il signifiait et qu’il voulait tisser avec le reste de la population. Michael Obolensky prit la tête de cette organisation avec 9 autres patients. Officialisé Le 15 mars 1944 le groupe WANA avait pour objectifs de favoriser le bien-être des patients et d’accompagner à la réinsertion de façon progressive, dans la société de ceux qui comme eux étaient touchés par des troubles psychiques. A l’époque, l’absence et/ou l’inadéquation de médicaments poussaient les malades à trouver d’autres moyens pour améliorer la qualité de leur quotidien.
Le premier Clubhouse au monde fut créé par deux femmes, Elizabeth Ker Schermerhon, bénévole des premiers temps, rejointe par Hetty Richard en 1948. Après avoir fait l'acquisition d'une maison à Manhattan les nouvelles administratrices firent appel à la communauté des WANA pour former la « Fountain House ». La force de ce modèle est que les membres sont considérés comme des personnes à part entière et non des malades. Ils ont les mêmes besoins, les mêmes aspirations et surtout les mêmes capacités que les autres personnes. La méthodologie promue à « Fountain House » est fondée sur l'empowerment, c’est-à-dire la reprise de pouvoir sur soi et la capacité d’agir pour soi.
En avril 2010, un français, Philippe Charrier, Chef d’entreprise, ayant dans sa famille une personne concernée par un problème de santé mentale, a eu l'occasion de visiter « Fountain House ». Ayant trouvé l'expérience formidable, il a décidé, avec le psychiatre Christian Gay, l'association « Entreprises et handicap », Jean-Jacques Margerie (un chargé de gestion lui-même atteint de troubles bipolaires) et quelques autres, de créer l'Association « Clubhouse France ».
Le principe fondateur du modèle Clubhouse se caractérise par la capacité de travail des membres (acteurs, bénéficiaires), leur force à être productifs et en parallèle à donner un sens et une valeur à leur travail.
John Beard, directeur de Fountain House de 1955 à 1982, met la valeur du travail au cœur de ce modèle du clubhouse, valeur importante, car elle permet de démontrer aux membres bénéficiaires qu'ils sont des personnes actives comme les autres au sein de la communauté.
La conviction de J. Beard, qui avait été travailleur social à l’hôpital de Detroit, était que les malades n'étaient pas uniquement définis par leur maladie, mais qu’ils leur restent des « îlots de bien-être et de santé ». Après avoir testé avec succès une méthode consistant en l’implication des patients dans les activités de la vie quotidienne du lieu de vie, J. Beard fit de cette méthode la ligne rouge du fonctionnement d'un clubhouse. C’est la base de la cogestion : salariés et membres bénéficiaires travaillent de concert. Cela permet de valoriser le travail fait par les membres, de les responsabiliser, et ainsi de les relancer dans une démarche positive de reprise de leur vie en main. La philosophie d'un clubhouse s'appuie en effet sur la reprise d'autonomie de ses membres ainsi que sur la « pair-aidance », c'est à dire le partage de bonnes pratiques entre personnes ayant de fortes similitudes (ici, de membre à membre).
Les membres entrants sont ainsi rassurés d'être aidés par des personnes ayant connu les mêmes difficultés auparavant, qui les comprennent et leur expliquent comment remonter la pente d'après leur propre expérience positive. Enfin, la cogestion remet les membres dans un rythme de travail, valorisé ensuite auprès des futurs employeurs. En effet, trouver un travail hors du clubhouse est l'objectif principal de ces personnes, car cela leur permet de gagner en autonomie (financière et sociale), en indépendance et en légitimité renforcée au sein de la société.
Clubhouse France est une association française loi de 1901, à but non lucratif, apolitique et sans obédience religieuse. Cette organisation non gouvernementale (ONG) a été créée en 2010 pour expérimenter pour la première fois le modèle Clubhouse en France. Elle œuvre pour la réinsertion professionnelle des personnes touchées par un handicap psychique.
Clubhouse France est soutenue par Clubhouse International depuis sa création.
L’association poursuit trois objectifs : rompre l’isolement des personnes touchées par un trouble psychique - faciliter la réinsertion professionnelle ou le maintien dans l’emploi - sensibiliser l’opinion publique et celle des entreprises sur les troubles psychiques.
Clubhouse Paris (premier et unique clubhouse français, ouvert en 2011) regroupe, en 2014, plus de 100 membres et salariés.
Son fonctionnement repose sur une éthique participative et collaborative. L’effectif présent se répartit quotidiennement les tâches de cogestion et les ateliers ayant pour but de privilégier l’accès à l’emploi de combattre les stigmatisations et les discriminations liées aux troubles psychiques.
Le lieu fonctionne 5 jours sur 7, de 9h30 à 17h30.
Les activités sont animées conjointement par les membres (les usagers en santé mentale), qui sont une cinquantaine, et les salariés (actuellement trois). « L'égalité absolue entre le staff et nous est un facteur essentiel pour retrouver l'estime de soi », assure l'un des usagers.
A la suite de réunions biquotidiennes, chacun s'inscrit sur un tableau pour une tâche : accueil, comptabilité, repas, formation, communication... Une usagère, qui, depuis qu'elle fréquente le club, a pu diminuer son traitement, met l'accent sur la « pêche aux nouvelles », qui consiste à s'enquérir du sort d'un membre inhabituellement absent. Autant d'activités, si basiques soient-elles, qui redonnent confiance en soi. Un atelier d'écriture devrait ouvrir le samedi et un autre de théâtre le dimanche.
Une autre usagère précise avoir trouvé au clubhouse un lieu « sans blouses blanches » et des « gens positifs ». « Ici, on n'est pas des pathologies sur pattes », confirme un autre. Tous confient avoir retrouvé l'envie d'agir et de faire des projets.
Le premier bilan a été positif, 80 usagers du Clubhouse Paris ayant accédé à un stage et/ou un emploi et/ou une formation.
Par ailleurs, 8 entreprises se sont engagées à réfléchir à la création d'« emplois de transition », qui seraient réservés aux membres du Clubhouse pour 6 à 9 mois, et qui seraient reconductibles.