L’approche systémique vient de l’école de Palo Alto.
Elle considère que l’individu fait partie d’un système, voire de plusieurs systèmes. Et qu’il est influencé dans sa façon d’être, aussi bien par lui-même que par les autres et son environnement.
La perspective systémique voit les problèmes du patient sous l’angle de la relation avec les différents contextes dans lesquels il vit : c’est-à-dire par exemple comme partenaire dans une relation de couple, comme membre d’une famille, comme personne avec des valeurs propres à une culture et/ou une religion… comme individu évoluant dans tel contexte socio-économique et politique…
Ainsi, pour mieux comprendre et faire évoluer les problèmes du patient dans son présent, le thérapeute va s’intéresser à son contexte de vie au sens large.
Elle considère aussi que la personne, au moment présent, est le produit de tous ses apprentissages antérieurs. Et pour cela, le thérapeute systémique fait en sorte de reconnaître le passé dans l’identité actuelle de la personne, mais en essayant de modifier les conséquences négatives des expériences passées qui créent en partie les difficultés actuelles.
C’est une thérapie qui accorde une grande attention aux aspects émotionnels mais aussi cognitifs des difficultés vécues par le patient, et également aux émotions et réactions de son entourage.
Elle se distingue des autres approches psychothérapeutiques, en ce sens où la personne n’est pas la seule analysée dans la démarche thérapeutique.
Elle considère que toute personne est construite à partir de son histoire, qui englobe aussi l’histoire de sa famille, et ce, parfois, sur plusieurs générations. Ses intentions, ses valeurs, celles aussi des autres, sont conditionnées par son environnement, qu’il soit proche ou plus élargi.
Et les difficultés d’une personne ne peuvent souvent se comprendre et s’appréhender que si on considère les liens avec le contexte familial, voire le contexte social, économique, culturel, institutionnel au sens large.
Ainsi, un événement peut être considéré comme une « régulation » du fonctionnement du système concerné, comme c’est souvent le cas au sein d’une famille.
Et au lieu de désigner un « mouton noir », de vouloir pointer une possible pathologie et/ou comportement destructeur et/ou situation négative d’un des acteurs du système (par ex, un problème de toxicomanie ou une pathologie mentale), l’approche systémique met en avant l’idée qu’un système, comme par exemple la famille, s’organise, fonctionne, se régule en fonction des interactions et à partir des règles, explicites et implicites, qui s’y créent. Les dysfonctionnements d’une personne pouvant alors se lire comme un effet de ces régulations.
Une maladie mentale peut être ainsi vue comme un mode d’adaptation à une structure pathologique des relations familiales.
Le thérapeute, s’il se veut systémique, devra se préciser à lui-même quel est le système avec lequel il prétend travailler. Cette exigence théorique le force donc avant toute chose à le délimiter.
Il devra ainsi définir quels sont les éléments (les personnes) constitutifs du système et situer ceux considérés comme à l’extérieur de celui-ci.
Lorsqu’un individu est confronté à des problèmes familiaux, le risque est de délimiter le système à la famille dite « nucléaire » (famille proche officielle). Et de ne pas vouloir tenir compte d’éléments autres comme les compagnons ou compagnes, les demi-frères ou sœurs, les belles-mères ou beaux-pères successifs, ou encore les enfants de la recomposition familiale…
De même, il peut être intéressant d’intégrer l’animal domestique car, par la place qu’il prend, il peut induire des règles de fonctionnement au système (disponibilité pour les sorties, choix des dates et du lieu de vacances…) – voir d’élargir parfois le système à d’autres acteurs concernés par la problématique de départ : autres services soignants et/ou médico-sociaux, justice, tutelle…
Le critère pourra être le fait que ces acteurs influent d’une façon importante sur le système concerné ; dans ce cas précis, il peut être pertinent de les intégrer.
De la même façon, il peut être éclairant de considérer certains facteurs, autres que le symptôme mis en avant, comme la maladie (mentale ou physique), l’addiction (alcool, drogue), le chômage, la pauvreté… comme de véritables « éléments » d’un système familial pour leur rôle programmateur incontournable.
Comme il est important de distinguer, au sein de la famille, celui ou celle qui a demandé au thérapeute d’intervenir, car son rôle n’est pas neutre.
Le thérapeute d’ailleurs est aussi un des éléments de ce système, à côté de la famille et des éventuels autres acteurs. Et l’énoncé du symptôme ou du problème dit aussi quelque chose de sa place dans la problématique.
En jonglant avec ces deux éléments que sont le symptôme énoncé (qui peut être la maladie mentale d’un des membres de la famille) et la délimitation du système, le thérapeute systémique est loin d’être réduit à une solution unique, et bien au contraire, les hypothèses de solution vont être multiples, selon la focale qu’on utilise.
La lecture systémique multiplie les possibles, et montre comment il existe souvent plusieurs façons de réagir adéquates, les possibilités d’action se situant au niveau de tous les acteurs.
L’important sera surtout d’éviter – et cela peut plus facilement s’évaluer – les interventions dont on peut prévoir qu’elles maintiendront le problème en état.
Dans la thérapie familiale, c’est la famille qui est considérée comme un « système » à étudier et à prendre en compte, système qui peut être défini comme un ensemble d’éléments (ici les membres de la famille) qui interagissent entre eux, et qui échangent également de l’information avec l’extérieur.
La thérapie familiale s’intéresse ainsi aux interactions entre les membres de la famille, et qui repose sur les hypothèses systémiques expliquées plus haut, qui considèrent la famille comme un système existant au sein de systèmes élargis (comme la communauté, la société, la culture à laquelle la famille appartient…).
Au démarrage, il est rare que tous les membres d’une même famille expriment le besoin d’être aidés. Lorsqu’ils se réunissent dans le cabinet d’un thérapeute familial, c’est en général parce que l’un des membres a été perçu comme « celui qui a des problèmes ». Et bien souvent d’ailleurs, il a déjà un long parcours thérapeutique derrière lui.
Le symptôme mis en avant est généralement le point de départ de la thérapie. Mais le but est de comprendre à quoi il « sert » dans la famille, pour amener celle-ci au-delà du processus de désignation du « patient », vers une lecture différente du problème et vers d’autres solutions.
Le fonctionnement d’une famille en crise est souvent celui d’une boucle qui se referme sur elle-même. Ce scénario illustre ce que la thérapie familiale nomme le principe d’homéostasie, processus par lequel le groupe maintient sa cohésion et s’oppose au changement. Dans cette optique, les symptômes du patient désigné – à un niveau inconscient – sert l’intérêt familial. La mise en évidence de cette circularité permet d’arrêter de désigner un « mouton noir » et de comprendre comment chacun participe au problème.
Il peut être intéressant également de réfléchir à la famille dans un sens plus élargi encore, même si les ascendants ne sont plus là, car il existe fréquemment des problématiques transmises de génération en génération.
Bon nombre de pathologies familiales s’articulent par exemple autour d’un non-dit (un secret de famille, par exemple) ou de souffrances qui, parce qu’elles n’ont pas été surmontées par les générations précédentes, continuent d’influencer la descendance.
La thérapie familiale conçoit la famille comme un système ouvert. C’est-à-dire que les causes de ses dysfonctionnements peuvent être internes ou externes. Avec cette approche, il n’y a pas de mauvais parent ni d’enfant à problème, mais une famille qu’il faut aider dans une épreuve de la vie.
L’objectif de cette approche thérapeutique est d’améliorer le fonctionnement familial, et par là même d’agir sur le symptôme mis en avant au démarrage.
Le thérapeute va d’abord définir un cadre de travail.
Ce qui définit le cadre de travail, ce sont : la fréquence des séances, l’invitation ou l’exclusion de tel ou tel membre de la famille, l’intervention d’un ou de plusieurs thérapeutes, la présence ou non d’une caméra ou d’une glace sans tain, etc.
Il n’y a pas de règle préexistante, si ce n’est de réunir au moins deux générations et de veiller à ne pas entériner les processus d’exclusions déjà à l’œuvre au sein de la famille, comme l’absence systématique d’un parent ou d’un enfant mis à l’écart.
Lorsqu’il y a utilisation d’une caméra ou d’une glace sans tain, elle se fait toujours avec l’accord de la famille. Ce matériel peut constituer une aide précieuse pour le thérapeute, lui permettre de prendre du recul sur ce qui s’est passé par exemple en séances, lui permettre aussi de demander l’avis d’un collègue qui peut voir des éléments qui lui ont échappés, et suggérer des pistes de travail.
De même, il est intéressant d’étudier où chacun s’installe, à quelle place. Les alliances et éloignements pouvant être interprétés en séance, en plus des paroles échangés.
Le thérapeute aura un rôle de médiateur et de régulateur ; il favorisera l’expression de chacun, ses souhaits, mettra aussi en avant les efforts fournis pour que la famille aille mieux.
Certains outils (arbre généalogique…) pourront être utilisés pour mieux comprendre le fonctionnement familial et ce qui s’y joue, notamment au niveau de la mémoire familiale (ce que les membres ont jugé bon de transmettre, ou au contraire de gommer… et ce que cela insinue comme valeurs défendues ou rejetées, et comme règles de conduite implicites).
Au fur et à mesure des séances, la communication au sein de la famille s’améliore généralement sensiblement.
Mais mieux communiquer ensemble n’exclue pas l’importance, pour chacun des membres, de se réapproprier une forme d’autonomie psychique, qui lui permet d’exister sans être étouffé par son appartenance au groupe familial.
Les séances de thérapie familiale durent entre une heure et deux heures. L’intervalle entre les séances est variable, et généralement décidé en fonction de la disponibilité de tout un chacun, et bien sûr de la difficulté des problèmes présentés.
La durée moyenne d’un traitement peut se situer entre 6 et 20 séances, même si bien sûr, cela est difficile à estimer car adapté à la situation forcément singulière de chaque famille.
Le thérapeute peut choisir de travailler avec un autre thérapeute qui co-animera les séances avec lui ; de même, il peut être décidé que lors de certaines séances, certains membres de la famille soient présents ou absents ; de même que des séances individuelles ou des séances avec les parents sans les enfants peuvent être également proposées en plus des séances de groupe.
Il peut arriver que certains acteurs extérieurs puissent être intégrés dans le processus, comme un soignant ou un travailleur social qui connaît particulièrement bien le patient et/ou sa famille.
Tout se décide en collaboration et en accord mutuel avec les membres de la famille qui sont toujours informés au préalable sur les choix du cadre, et rien ne leur est imposé à leur insu.
Tout problème qui affecte la vie d’une personne, en lien avec ses relations familiales et les contextes plus larges, gagnera à être travaillé avec l’approche systémique.
Et toute situation qui affecte les relations entre les membres d’une famille peut tirer bénéfice d’une thérapie familiale.
La thérapie familiale est certainement utile dans les moments de crise mais également pour les problèmes récurrents, comme ceux qui peuvent être liés à la maladie mentale d’un des membres de la famille.
Dans certains pays européens, comme la Finlande et le Royaume Uni par exemple, ces approches sont d’ailleurs très accessibles et bien implantées au sein des services publics.